La Dimension Antichrétienne de la Révolution – Xavier Martin

Peut-être plus qu’une simple dimension parmi d’autres, la révolution apparait essentiellement comme une tentative de destruction du Catholicisme et l’ordre révélé.
Le Roi Louis XVI et la Monarchie Française ayant été des victimes collatérales des ennemis de Notre Seigneur.

Gesta Dei per Francos !

« Le Roi des Francs Est un Roi Catholique »

« … Et le pape Saint Grégoire le Grand rendait encore à la couronne des Francs, portée par l’obscur Childebert II, ce magnifique témoignage « qu’elle est autant au-dessus des autres couronnes du monde que la dignité royale surpasse les fonctions particulières ». Pourquoi ? Parce que le roi des Francs est un roi catholique « qui fait briller le flambeau de la foi au milieu des ténèbres d’infidélité qui enveloppent encore les autres peuples ».

Rôle qu’allaient reprendre et bien plus pleinement les descendants de Pépin d’Héristal, les fondateurs de la dynastie carolingienne qui conquit le trône par les services qu’elle rendit à la foi et à l’Église catholiques.

Charles Martel , Marteau des infidèles

Charles Martel à la bataille de Poitiers 732
« Charles Martel écrase à Poitiers une formidable armée d’arabes qui menaçaient l’Europe. »
Image à collectionner, fin XIXe siècle.

Au fond de l’Arabie, un homme s’était levé, doué d’un génie mystique et d’une astuce politique qui se complétaient, loin de se nuire. De l’Ancien Testament, et même de l’Évangile qu’il n’ignorait pas, Mahomet avait tiré les éléments d’une religion nouvelle dont il s’était proclamé le prophète. Par le culte austère du Dieu unique, par une morale pleine de condescendance aux pires faiblesses de l’humanité, par des pratiques rituelles strictes mais faciles à suivre, par la Guerre sainte enfin, il avait fanatisé les Arabes, après les avoir unis. En moins d’un siècle, des plateaux de l’Iran aux rives de l’Atlantique, puis jusqu’aux Pyrénées et à la Garonne, le flot avait déferlé, recouvrant toutes les églises du Christ sous ses vagues dévastatrices. A l’Orient et à l’Occident de l’Europe, le Croissant avançait ses cornes, redoutables tentacules. Allait-il les refermer par une dernière victoire ? Nos mères allaient-elles connaître la honteuse clôture du harem, le misérable esclavage de la femme musulmane ? L’Évangile allait-il succomber devant le coran ? Déjà, les troupes d’abdérame s’étaient montrées sur la Loire, la Seine et l’Yonne.

Dieu fait entendre son appel et voici que se dresse le duc des Francs, Charles Martel. Il s’avance et l’arabe recule. Entre Tours et Poitiers, les légers cavaliers d’abdérame viennent briser leur élan contre le mur d’airain que les Francs lourdement armés leur opposent.

C’en est fait : le royaume des Francs, la patrie, la chrétienté, la civilisation sont sauvés. Pour la seconde fois, et bien plus encore que la première, la guerre nationale des Francs prend l’allure d’une croisade. Chevaliers du royaume des Francs, nos pères sont aussi les Chevaliers du Christ et jusqu’à Charlemagne ils vont poursuivre la guerre sainte contre l’islam.

Les Francs, Défenseurs de la Papauté

Il restait encore un dernier service à rendre à l’Église romaine, celui, dont Joseph de Maistre a dit que les Français ne sont pas à beaucoup près assez fiers, « d’avoir constitué humainement l’Église catholique, en donnant ou en faisant reconnaître à son chef le rang indubitablement dû à ses fonctions divines ».

Étouffée à Rome même entre les Lombards qui la menaçaient de tout près et les Byzantins qui jamais n’avaient renoncé à subordonner le Pape à l’Empereur, la papauté appela les Francs. Pépin et ses fils acceptèrent, — c’est l’expression dont se sert le grand historien Fustel de Coulanges, — non pas seulement de porter au Pape un secours temporaire, mais d’exercer « une mission de défense générale et perpétuelle à l’égard du Saint-Siège ». Et ils l’acceptèrent, parce qu’ils se sentaient responsables devant le monde chrétien parce que, disent-ils, « c’était l’Apôtre qui le leur demandait ». La victoire couronna leur bonne volonté ; ils triomphèrent en Italie des ennemis du Pape et, par leurs donations successives, ils constituèrent en faveur de celui-ci l’État temporel qui, pour de longs siècles, garantira l’indépendance nécessaire du Pontife romain.

La reconnaissance fut proportionnée aux services rendus. L’Apôtre déclara que « de toutes les nations qui sont sous le ciel, aucune ne lui avait montré plus de dévouement que la nation franque ». Il éleva les princes francs à la dignité de « fils adoptifs de Saint Pierre ». L’oratoire romain de Sainte Pétronille, fille du chef des apôtres, témoignera, au profit des rois de France, de cette glorieuse parenté.

Mais ne convenait-il pas de transformer ces accords successifs et partiels, si étendus qu’ils fussent, en une alliance définitive, en une organisation stable du monde chrétien, qui, depuis si longtemps, cherchait sa forme ? Déjà le pape Zacharie avait présidé à la substitution, dans la monarchie franque, de la dynastie de Pépin d’Héristal à celle de Clovis, lorsqu’il avait prononcé la fameuse parole « qu’il convenait que celui qui exerçait le pouvoir royal possédât aussi le titre royal ». Déjà son successeur, le pape Étienne II, avait consacré par l’onction sainte Pépin et ses fils, défendant à quiconque de chercher un roi hors de la descendance de ceux à qui la grâce de Dieu et la main de l’Apôtre venaient de donner la couronne.

Pourtant la monarchie franque, c’était encore une monarchie nationale ; ce n’était pas la monarchie impériale, universelle, que semblait réclamer comme couronnement de son organisation la cité chrétienne : un chef spirituel, un chef temporel, étroitement unis pour la même œuvre, le gouvernement des hommes.

Dans la nuit de Noël de l’an 800, à Saint-Pierre de Rome, le pape Léon III accomplit le dernier geste, réel et symbolique, en posant sur la tête de Charlemagne la couronne de l’empereur d’Occident. Du royaume des cieux, dont il tenait les clefs, le pêcheur galiléen ratifia l’acte de son successeur. Par la pensée du Pape, par la main du roi des Francs, l’évolution, commencée depuis plus de quatre siècles, s’achevait : Gesta Dei per Francos ! [ les Œuvres de Dieu par les Francs ]

Extrait de : La Vocation Catholique de la France et sa Fidélité au Saint-Siège à travers les Ages, par Mgr Alfred Baudrillart, 1928.

Couronnement de Charlemagne en 800

Couronnement de Charlemagne comme Empereur d’Occident, à Rome dans l’Église St-Pierre, le jour de Noël 800, par le Pape Léon III. Image à collectionner, fin XIXe siècle.

Sainte Jeanne d’Arc et la Monarchie

Sainte Jeanne d'Arc au Sacre de Charles VII, Fresque de la basilique de Domrémy par Royer

Le Sacre de Charles VII.
L’une des fresques de la Basilique Nationale Sainte Jeanne d’Arc de Domremy dite Basilique du Bois Chenu, peinte par Lionel Royer entre 1910 et 1913.

« Talleyrand a dit de la Révolution qu’ «elle a désossé la France» ; c’est trop peu dire, elle l’a pulvérisée.
Avant la Révolution il y avait une France catholique organisée, vivante, agissante, basée sur l’Évangile, avec ses organes spirituels, les évêques et leurs églises, s’arc-boutant à leur clé-de-voûte : le Pape ; avec ses organes temporels, les États, les corporations, les familles, s’arc-boutant à leur clé-de-voûte : le Roi.
Une seule base spirituelle : l’Évangile, commenté religieusement par les deux clergés séculier et régulier, sous l’autorité du Vicaire de Jésus-Christ et politiquement par le représentant de la Loi salique : le Souverain.

Deux clés-de-voûte, l’une spirituelle : le Pape ; l’autre temporelle : le Roi, pour les deux édifices qui sont comme les deux ailes d’un même corps de bâtiment, dont la Clé-de-voûte suprême au frontispice est le Christ lui-même Chef des nations comme des individus.
Dieu à la base, Dieu au sommet ; entre deux, se donnant la main, l’Église et la France !
Telle était la France catholique d’avant 1789 ! La Révolution a voulu supprimer tout cela d’un seul coup. Elle a commencé par la base : l’Évangile, relégué par les Droits de l’homme au rang méprisable des opinions discutables et discutées.
Elle a continué par la clé-de-voûte temporelle : le Roi, qu’elle a supprimé.
Elle vient d’achever par la clé-de-voûte spirituelle : le Pape, à qui elle a signifié brutalement par la séparation de l’Église et de l’État qu’il n’a plus rien à voir dans un pays désormais sans Dieu, c’est-à-dire sans base et sans idéal, sans racine dans la passé, sans espérance dans dans l’avenir.
Voilà comment la France, séparée de sa base et de ses deux clés-de-voûte, tombe en poussière ! Quoi de plus naturel ! Le miracle serait qu’il en fut autrement.
Il y a bien encore des catholiques français à l’état de molécules éparses, isolées ! il n’y a plus de France catholique ! Telle est l’œuvre de la Révolution !

Comment y remédier ?

Pour sauver les Églises de France — et non l’Église de France ; il n’y a pas plus d’Église de France qu’il n’y a d’Église d’Espagne, d’Autriche, d’Allemagne ou d’Italie — pour sauver les Églises de France, notre bien-aimé Père le Pape Pie X a dit aux catholiques de se grouper autour de leurs évêques en un compact Parti de Dieu et pour donner à ce Parti de Dieu la cohésion française qu’il tenait autre-lois de sa clé-de-voûte naturelle, aujourd’hui absente : Le Roi très chrétien, il lui donne pour clé-de-voûte surnaturelle une sainte française, la bienheureuse Jeanne d’Arc qu’il vient d’élever sur les autels en la nommant «Chef du Parti de Dieu» : Ce choix est plus que providentiel, il est divin !
Jeanne d’Arc n’est-elle pas l’intermédiaire obligé entre les deux clés-de-voûte de la France intégrale qu’il s’agit de restaurer ? N’est-ce pas « au nom du Roi du Ciel » clé-de-voûte suprême des deux autres, qu’elle vint, appuyée sur la clé-de-voûte indéfectible : l’Église, qui sanctionna sa mission, restaurer la clé-de-voûte chancelante : le Roi très chrétien ?

Le Saint Père a donc fait son devoir, tout son devoir, en ce qui nous concerne et avec une intuition géniale, mieux que cela, avec une tendresse, une délicatesse «maternelles» dont il voudra bien trouver ici le plus reconnaissant, le plus filial merci.
Il ne pouvait faire mieux, il ne pouvait faire plus ! sous peine de s’entendre accuser par l’ennemi, d’ingérence dans notre politique intérieure.
Par devoir d’état, il devait se borner à maintenir le contact des églises, dispersées par l’absence du Roi, avec leur clé-de-voûte spirituelle : la Papauté.
Et c’est pourquoi dans son discours du 13 décembre 1908, à la gloire de Jeanne d’Arc, il ne célébra que le cri de la Bienheureuse qui répond à la moitié de sa mission : «Vive le Christ qui est Roi de France.»
Notre devoir à nous catholiques français, comme Français, va plus loin ! Nous devons célébrer l’autre cri de la Bienheureuse qui, avec le premier, résume et symbolise sa mission tout entière : «Vive le Roi de France qui est lieutenant du Christ !»
C’est par ces deux, cris inséparables sur ses lèvres comme ils l’étaient dans son cœur, qu’elle a raffermi, par le miracle, la jonction compromise des deux clés-de-voûte de notre pays : l’Église et la Monarchie.
C’est par ce double cri qu’elle la rétablira et refera du même coup, ce qui fut idéalement, dans le passé de la France, le Parti de Dieu !

Nous allons démontrer que le Parti de Dieu ainsi entendu est :
1° La loi historique et politique de la France ;
2° Sa loi philosophique et sociale ;
3° Sa loi religieuse et surnaturelle ou l’instrument nécessaire de sa Vocation.
Triple loi que Paul Bourget résumait en une seule quand il disait, au dîner des médecins d’Action française, le samedi 20 novembre 1909 :

«Le développement d’une, nation comme celui d’un être, est inscrit dans ses origines qui lui marquent sa direction.»

Extrait de : Jeanne d’Arc et la Monarchie, par M. l’Abbé Marie-Léon Vial. 1910. Préface.